shim transpar Genevieve Guilhaume

Présentation de l'auteure

Ce livre explore le « sens dessus » et le « sens dessous » du coaching.

Comment a été inventé ce dispositif ? Dans une première partie, l’ouvrage définit cette démarche d’accompagnement destiné à accroître les potentiels de la personne dans un but de performance. Il rappelle l’origine du coaching, ses multiples sources, philosophiques, religieuses, sportives, politiques, la diversité des profils de coaches, l’existence d’un véritable marché du coaching. L’ère du coaching s’affirme dans le monde de l’entreprise et dans l’ensemble de la société. Dans l’entreprise, le « sens dessus » réside dans la présentation par les coaches d’un dispositif très professionnel. Le « sens dessous » révèle une démarche proche d’un travail psychologique visant à transformer les comportements des managers qui ont pour rôle de conduire les changements organisationnels dans le cadre d’une entreprise flexible, en concurrence dans un marché mondialisé.

Geneviève Guilhaume est enseignante à l'Université Paris 13. Membre associé du Labsic (laboratoire des sciences de l'information et de la communication, Université Paris 13). Responsable du master en formation continue Communication et ressources humaines.

L'ère du coaching
Critique d'une violence euphémisée      
Prix public : 10,00 € 
 

ere du coaching 1ere de couv.

 

Comment le coaching est-il légitimé dans l’entreprise ?
La deuxième partie du livre tente de répondre à cette question. À travers cet accompagnement des managers, les consultants-coaches diffusent un nouveau modèle de manager, celui du manager-communicateur, qui est un médiateur, un homme ou une femme connexionniste, un facilitateur, un mobilisateur. Proposant une vision aux salariés, à l’écoute, sachant partager les informations, développer des relations transversales et non plus hiérarchiques, ce manager « éclairé », « hors limites », « intuitif » doit lui-même faire preuve avant tout de ses qualités personnelles, de ses capacités à communiquer. Le coaching est présenté comme une démarche scientifique, s’appuyant sur des théories utilisées dans les thérapies brèves comportementales, comme l’analyse transactionnelle ou la programmation neuro-linguistique. Que découvre-t-on à partir des pratiques des coaches et des managers, révélées dans l’enquête ? La communication des responsables est essentiellement paradoxale : l’appel à la parole authentique des salariés censés s’impliquer dans les multiples changements est sans cesse confrontée au « dogme », qui vise à faire passer les décisions financières et ce qu’elles impliquent en termes d’organisation du travail et de mobilité des salariés. Cette réalité paradoxale est euphémisée dans la promotion du coaching basée sur la théorie du « gagnant-gagnant », celle d’un monde harmonieux, où le manager se voit offrir la possibilité de se développer personnellement pour mieux répondre aux exigences de performance de l’entreprise. Le « sens dessous » réside donc dans l’ambivalence du dispositif, bien illustrée par le double personnage du « coach rationalisateur », se parant des habits du professionnel, et du « coach psy » revendiquant son vécu thérapeutique, sa philosophie humaniste. La légitimation du coaching est donc controversée.

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N’assisterait-on pas à une violence et une domination inédites à travers l’extension du coaching ?
Dans une troisième partie, on s’intéresse au dispositif lui-même qui s’est construit sur des paradoxes : dans les finalités énoncées, dans la structure du contrat, dans les méthodes utilisées, dans l’évaluation de la démarche. Le flou de la professionnalisation des consultants-coaches manifeste ces contradictions. Le coaching ne servirait-il pas à préparer les managers aux contradictions de leurs rôles ? Il serait alors le vecteur de nouvelles formes de domination, s’exerçant sur l’individu, à travers un travail psychologique visant à faire intérioriser des injonctions paradoxales et… sans contre-pouvoir institué. Les managers interrogés semblent opposer une faible résistance à ce type de démarche, incontournable dans la progression de carrière. L’engouement pour le coaching est lié à un phénomène de connaissance-reconnaissance de soi. L’empathie des managers à l’égard des coaches « humanistes » est présente. L’importance pour les managers de transformer leur « savoir être », leur « style de communication » est avérée. Si les responsables coachés développent peu de logiques d’action à l’encontre du coaching, ils expriment une souffrance au travail. Une forme de coaching de « remédiation » se développe actuellement dans l’entreprise pour atténuer cette souffrance.

Se faire coacher comme « personne en difficulté », chômeur, comme homme ou femme recherchant l’âme sœur revient à accepter de se conformer à un modèle qui est celui de la responsabilité personnelle et de l’excellence : l’individu à travers le coaching porte ainsi la responsabilité de tout ce qui lui arrive. Le coaching travaille alors la présentation de soi essentielle dans l’atteinte d’une performance, qui n’est plus présentée comme dépendante des conditions économiques ou sociales. Le risque de l’ère du coaching est donc bien celui de la mise en cause des identités individuelles et collectives, dans un capitalisme qui exerce une emprise de plus en plus forte sur les personnes.

Geneviève Guilhaume